Appels d’offres et économies durables
Un acheteur doit savoir produire des économies sur le long terme mais également de la valeur !
A ce titre, je suis fondamentalement convaincu que l’approche cost-killing est révolue. Pourquoi ? Tout simplement parce que le cost-killing entrave justement à la création de valeur…
Je prends assez souvent l’exemple d’une négociation d’une flotte automobile en location longue durée. Dans ce dossier, le cost-killing consisterait à obtenir le meilleur loyer possible sans tenir compte d’autres postes de dépenses que l’acheteur peut détecter en décomposant les coûts. Créer de la valeur sur ce dossier, c’est négocier gratuitement ou à prix limités, des sessions d’éco-conduite sur un simulateur ou des sessions de conduite sur neige pour obtenir les bons réflexes.
On voit bien qu’en étant dans cette démarche, on créée de la valeur puisque :
– On assure la sécurité du collaborateur (c’est un enjeu RH fort)
– On lui donne de bons réflexes, des bonnes pratiques de conduite qu’il pourra également appliquer au quotidien dans sa vie personnelle et familiale (enjeu RSE)
Cette démarche a un impact financier positif pour l’entreprise car la sinistralité sera certainement moindre et le poste carburant allégé car les collaborateurs auront une conduite plus souple (enjeu financier)
Maintenant, une fois qu’on a posé le cadre et qu’on a précisé que l’acheteur doit être un vecteur d’économies pérennes et un créateur de valeur, il faut revenir un peu en arrière. J’ai une conviction profonde que des économies long terme ne sont possibles qu’en ayant mis en place un processus d’appel d’offres structuré en amont.
Lorsqu’un acheteur lance des appels d’offres, c’est pour signer un marché qui dure généralement entre 3 et 5 ans. Donc il est important de prendre le temps en amont pour bien cadrer la démarche. Une démarche d’appel d’offres structurée prend 3 à 6 mois. J’ai, même constaté, des démarches plus longues de 9 mois à 1 an lors d’achat d’ERP ou lors de mise en place d’un référencement d’ESN (Entreprises de Services Numériques) ou de cabinet de conseil Métier où le dépouillement peut embarquer une centaine de sociétés !
A mon sens, l’acheteur qui négocie le mieux et qui crée de la valeur intègre 5 facteurs clés de succès dans sa démarche :
Un cahier des charges exhaustif, challengé et définissant le juste besoin.
Le juste besoin me parait capital car j’ai trop souvent vu, sous couvert de s’acheter du confort et de la sécurité, certaines sociétés « charger la mule » en terme d’expression de besoins. Augmenter le besoin a forcément comme conséquence néfaste de faire augmenter la note (ça va toujours vous coûter plus cher d’acheter 5 baguettes qu’une seule).
Par exemple, lorsque j’accompagnais une grande Mutuelle dans le cadre d’achat de logiciels, on pouvait demander 4 à 5 environnements différents (environnement de production, environnement de pré-production, environnement de recette, environnement de tests…)
- Une bonne maitrise des risques (c’est parfois le choix de retenir 2 fournisseurs pour sécuriser l’approvisionnement
- Une prise en compte de la RSE dans la démarche (travailler avec des fournisseurs ayant une réelle approche environnementale, sociale et éthique, favoriser les circuits courts, encourager les fournisseurs locaux et régionaux). Il faut désormais systématiser la mise en place d’un critère RSE dans l’évaluation globale d’un fournisseur en complément des traditionnels critères « QCD » (Qualité, Coût, Délai)
Par ailleurs, des économies pérennes peuvent être réalisées dans le cadre d’un plan de progrès que l’on contractualise au démarrage de la relation. En effet, lorsque tous les leviers de négociation ont été activés, nous n’avons plus de marge pour la négociation. Il est alors possible de s’inscrire dans un plan de progrès pouvant générer des économies en année 2 ou en année 3 du contrat ou pouvant améliorer sensiblement la qualité de service offerte.
Pour illustrer le propos sur des projets informatiques :
Dans un cas, j’avais réussi à améliorer les temps de résolution des incidents de sévérité 1 (bloquant) et 2 (majeur) en cours de contrat car l’éditeur avait une meilleure connaissance de notre environnement, des interfaces avec d’autres outils. Sur les incidents de sévérité 1, nous étions donc passé d’une correction de l’anomalie en 4H au lieu de 6H ; soit une amélioration de 33%, fortement appréciée par la DSI et par les utilisateurs métier de l’application.
Sur un autre dossier, j’avais réussi à optimiser l’enveloppe financière de Maintenance informatique consécutivement à une diminution des incidents constatés sur l’année écoulée. Qui dit moins de bugs, dit moins de sollicitations du support de l’éditeur, moins de charge, moins de temps passé et donc un budget alloué plus faible.
Ce plan de progrès doit idéalement être discuté lors de la phase d’avant-vente. Il est souvent plus difficile à mettre en œuvre lorsque la relation est établie.
Ecoutez le podcast entier réalisé avec Olivier Audino :
https://www.youtube.com/watch?v=4Z_4FtnvBSs&list=PLDe6v1brbGNtA69DzNAwbFEuvXFC7WuY9
